Il faut ici aborder la langue sous deux angles : le premier, celui de la pure linguistique, pour mieux comprendre comment la langue lettone est à la fois un vecteur de communication et un outil d'étude. Le second est celui de l'importance politique de la langue lettone et de la manière dont elle est instrumentalisée et sera traité dans un second article.
Le Letton est une langue indo-européenne de la branche des langues baltes. Nous avons déjà expliqué les racines du peuple letton, mais pour la langue, une illustration peut remplacer un long discours.
Les langues baltes occidentales (vieux Prussien, Galindien, Skalvien, Sudovien) ont disparu et seul le vieux prussien est attesté par des textes écrits. Les langues baltes orientales sont le Lituanien et le Letton.
Il existe des variantes régionales qui, pour le Letton, sont pour l'essentiel le Latgalien (qui est celle qui dérive le plus du modèle standard) et le Courlandais (régime de déclinaison simplifié et prononciation spécifique).
On les considère en général comme des langues archaïques car leur structure est extrêmement proche du latin ou du grec ancien. Elles ont en commun un régime de déclinaison à 7 cas (nominatif, accusatif, datif, génitif, locatif, instrumental, vocatif), deux genres (masculin et féminin), deux quantités (singulier et pluriel, quoiqu'il existe aussi une notion de dual que l'on retrouve aussi dans les langues slaves : "abi"), ainsi qu'un système de conjugaison assez simple (présent, futur, passé simple, passé composé, plus que parfait) qui n'emploie de verbe auxiliaire que pour le passé composé (et un plus que parfait très rarement utilisé). Le Letton dispose de surcroît de trois modes de désignation : l'indéfini ("ça"/"tas"), le défini ("ceci"/"šis") et le surdéfini ("celui-ci et pas un autre"/"ši tā").
La structure de la phrase lettone est relativement proche de celle des langues latines (sujet, verbe, complément). Elle est plus stricte que celle de la langue russe. Le groupe sujet ou objet place l'ensemble des qualificatifs et épithètes avant le nom (un peu comme en anglais : "La grande voiture rouge de Jean" / "John's big red car" / "Jāņa lielā sarkanā mašīna". La construction de noms et d'adjectifs à partir des verbes ou du génitif est très fréquente. L'usage d'un corpus important de préfixes permet la fabrication de mots "valises" par agrégation un peu comme en allemand ("maksa" : le paiement -> "apmaksa" : le paiement total -> "priekšapmaksa" : règlement d'avance).
Le corpus de vocabulaire letton fait appel à trois sources principales : les racines baltes par elles-mêmes, les mots issus de la langue Live (la population indigène avec laquelle les baltes ont cohabité la région pendant près de deux millénaires) et la langue allemande qui était celle de la classe dominante du XIIIème au début du XXème siècle. A celà, il faut ajouter des mots issus des langues scandinaves, en raison des échanges et occupations au travers de la mer Baltique. Il existe aussi des emprunts au Russe, au Français, à l'Anglais et au Néerlandais, sans doute dûs aux échanges commerciaux. Le Lituanien, même s'il se réclame d'une plus grande pureté linguistique, est beaucoup plus slavisé en raison de nombreux emprunts au Polonais et de l'usage pendant plusieurs siècles du Slavon de cour pour les textes officiels.
L'alphabet letton se compose de 34 lettres :
A | Ā | B | C | Č | D | E | Ē | F | G | Ģ | H | I | Ī | J | K | Ķ | L | Ļ | M | N | Ņ | O | P | R | Ŗ | S | Š | T | U | Ū | V | Z | Ž |
a | ā | b | c | č | d | e | ē | f | g | ģ | h | i | ī | j | k | ķ | l | ļ | m | n | ņ | o | p | r | ŗ | s | š | t | u | ū | v | z | ž |
Le signe diacritique sur les voyelles indique leur allongement : c'est, de même qu'en musique la différence entre une note noire (la voyelle non-accentuée) et une blanche (la voyelle accentuée).
L'accent des consonnes indique une mouillure ou un chuintement. La valeur est la même que pour les autres langues d'Europe centrale, orientale et baltique utilisant le même alphabet.
Cependant cet alphabet est assez récent : il date des années 1930. Jusqu'à la fin des années 1930, on continue à voir des textes utilisant l'alphabet suivant :
Toutes ces graphies sont empruntées à d'autres langues, car, initialement, le Letton n'était pas une langue écrite. Il était transmis par une complexe tradition orale fondée sur des poèmes courts à métrique spécifique : les dainas.
On peut noter une forme d'écriture spécifique aux anciens baltes, uniquement destinée à la relation au domaine sacrée : latviešu raksts. On la retrouve dans les motifs des costumes traditionnels et comme motifs de gravures décoratives.
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